Comme certains le souhaiteraient, classer le Bassin d’Arcachon au patrimoine mondial de l’Unesco pourrait, à qui n’en verrait pas les tenants et les aboutissants, sembler un projet favorable, une labellisation auréolée des vertus d’une prestigieuse organisation internationale.
Paré de la reconnaissance d’une exception naturelle que nous connaissons tous, et de la perspective d’une certaine « conservation », le label mondial serait-il l’ultime atout nécessaire ?
Pour le savoir, il suffira de regarder, sans détourner les yeux, ce qui soutient le Bassin d’Arcachon, et ce qui le dégrade.
Pas un document d’urbanisme, de promotion touristique ou de développement qui ne soit introduit par le constat du caractère remarquable du Bassin, de ses sites emblématiques, de sa Nature, de l’attrait de ses beautés et de la nécessité de préserver cela.
Passé le préambule revient le « marketing territorial », et chacun de ces documents promeut mille formes de valorisation –c'est-à-dire de marchandisation- de l’espace terrestre, lacustre, maritime. Ainsi, la magnificence du Bassin d’Arcachon aura, en peu de temps, causé un énorme afflux démographique externe et un phénoménal afflux touristique –lesquels vont sans cesse croissant avec leur corollaire de dégradations et de pressions multiples.
Le Bassin d’Arcachon, ses sites, ses ressources se dilatent-ils en proportion de ces déferlements ? Non.
Le surdéveloppement, la surabondance d’infrastructures, de zones commerciales, les surconsommations, les pollutions, les détériorations, les perturbations, la rapide transformation en banlieue de la mégapole bordelaise, la « Saint-Tropisation » : ces pressions s’exercent sur le même petit territoire, en voie d’être exsangue à force d’être sollicité. Tous les voyants clignotent et sont au rouge: les dégradations sont de moins en moins réversibles.
Ici interviendrait l’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco, censément protecteur, assurément promoteur, envisagé comme une impulsion supplémentaire -notamment pour l’économie touristique. Au vu des dégradations déjà subies, ce projet est typiquement une fausse bonne idée, synonyme de marchandisation et, conséquemment, de fragilisation accrue d’un territoire qui, déjà, courait à sa perte.
D’aucuns maugréeront que certains protecteurs de l’Environnement visent la « réserve d’Indiens ». Force est de constater que la « conquête de l’Ouest » exerce sans discontinuer sa menace sur les espaces naturels et sur les habitants de ce territoire.
Bien avant qu’il soit question d’Unesco, le Bassin d’Arcachon, fort d’une intense conscience de Pays, s’est doté de dispositifs protecteurs : Réserves Naturelles, Sites Inscrits et Classés, Natura 2000, Parc Naturel Marin…
Ces outils de gestion, dont la finalité est une protection réelle, ne s’assortissent pas d’un redoublement d’attraction. Ils parent modestement à l’essentielle urgence de sauver ce qui peut l’être encore : qualité du milieu, productions primaires issues de l’exploitation de la Mer, sauvegarde de la biodiversité et des sites, qualité de vie des habitants.
Françoise Branger.