Le Mystère ensablé du trou Saint-Yves

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mercredi 23 octobre 2013
Le Mystère ensablé du trou Saint-Yves

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ARCACHON, novembre 1969, un avion s’écrase au large de la plage Pereire. Il est remorqué vers une fosse profonde où il retrouve la compagnie de quelques bateaux.

Ce jour-là, les pêcheurs d’Arcachon eurent à remorquer une drôle d’embarcation. Un avion, un Mystère IV qui, quelques jours plus tôt, avait fait un spectaculaire plongeon au large de la jetée Pereire, après un non moins spectaculaire carambolage en vol à près de 700 km/h.

Mardi 18 novembre 1969, vers midi, les zonzons des zincs zinzinulent dans le ciel du Bassin. Pour une fois, ce n’est pas l’orage. C’est qu’après des mois de pluies, orages et tempêtes, le temps s’est calmé. Ciel clair et dégagé, températures voisines de zéro. La mer ne doit pas être équatoriale. On se hasarde à mettre le nez dehors, bien s’en faut pour voir deux aéronefs s’embrasser au-dessus des eaux. Le premier, l’habitacle à moitié arraché, parvient à rentrer à la base de Cazaux. Le second semble piquer vers la ville, mais le pilote parvient à le redresser vers la mer, dans laquelle il tombe à pic, à 500 mètres au large de la plage Pereire, près de la bouée n° 15.

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Le lieutenant Rion s’est éjecté de son siège alors que son appareil n’était qu’à 50 mètres au-dessus de l’eau

Le lieutenant Théophile Rion, directeur des vols à la base aérienne de Cazaux, s’éjecte de son siège alors que son appareil n’est qu’à 50 mètres de hauteur… Les pêcheurs s’organisent spontanément. Plusieurs bateaux s’avancent vers le cockpit fracassé qui tangue sur l’eau et son pilote à la brasse qu’ils ramènent vers le rivage. Puis chez lui, rue Guynemer à La Teste, auprès de sa femme, qui en a vu d’autres…

Un sacré personnage, cet officier nanterrien court sur botte, vif, 76 fois touché en combat aérien, plus de 300 missions de guerre, deux fois crashé, moultes fois blessé, et chevalier de la Légion d’honneur depuis déjà deux ans. Il a 37 ans. Deux ans plus tôt, il a tenu tête, seul avec un pistolet et gravement blessé, à une escouade de fellaghas après le crash de son avion dans la neige des Aurès en Algérie. « Théo » comme l’appellent affectueusement ses camarades, pilote depuis l’âge de 17 ans. Il a plus de 5 000 heures de vol à son actif.

Dynamitage abandonné

Dix ans tout juste que la base aérienne de Cazaux sert de centre d’étude et d’instruction pour les armes nucléaires et de centre d’entraînement pour les combats en vol. Un escadron de chasse a été formé en 1963, avec une flotte de Mystère IV, qui sortent des usines Dassault de Mérignac. Un petit bolide long de 12,89 m, 750 kg, deux canons, 1 120 km/h…

Le sort du Mystère IV qui surnage encore au large laisse les autorités perplexes. On pense le remorquer vers le port pour un ferraillage en règle. L’affaire se présente un peu complexe. Comment sortir de l’eau un tel engin… Entre la base aérienne et l’état-major du port, ça se gratte la tête. En attendant, on ne peut pas laisser l’épave au large de la plage, dangereux. Enfin, les militaires récupèrent quelques pièces sur l’appareil. Des avions, ils en ont déjà confié aux profondeurs du lac de Cazaux, Cessna, Junker…

Une fosse dans le chenal

On décide unanimement de remorquer le Mystère vers le cimetière de bateaux. Le trou Saint-Yves, au large de la jetée de la Chapelle. Une large fosse d’une trentaine de mètres, sans doute l’endroit le plus profond du Bassin. Plusieurs épaves gisent ici, chalutiers, cargos, « La Petite fleur de Lisieux », « Le Côtre bleu », la « Mado »… Et même une vedette de gendarmerie…

Le trou Saint-Yves est bien connu des plongeurs. Un petit abîme dans un champ de dunes sous-marines, sur la rive concave du chenal du Teychan, qui se sont affaissées brutalement. Son nom ? Il le doit à cette villa qui arbore un joli belvédère blanc et vert, la villa Saint-Yves, construite en 1910 pour le prince Auguste de Broglie. À l’époque, elle disposait d’un débarcadère privé, effondré, probablement, suite à la formation du trou.

Notre Mystère ne sera jamais dynamité. Il est si ensablé que les plongeurs, qui apprécient ce spot où la vie marine se fixe avec volubilité, ne parviennent pas toujours à le localiser. Certains prétendent même qu’il n’existe pas.

Six mois après le crash du lieutenant Rion, un autre Mystère IV s’écrase en forêt de La Teste. Le pilote, cette fois, aura moins de chance. Quand à Théo, il a été consacré treize fois meilleur pilote de chasse « tireur » de l’Armée de l’Air au cours de sa carrière.

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PLUS :

 Le site regorge d'épaves de bateaux : le cotre bleu, la Poupe, La Mado, le Santez Ana, la petite fleur de Lisieux.

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 - Le Cotre Bleu : Une des plus célèbre épave, coulé le 22 juin 1976, est le Cotre-Bleu ex. Joseph-Mathilde, chalutier en bois immatriculé ARC 13319 puis AC322787, qui fut construit en 1940 aux Sables d'Olonne. Il arborait fièrement une superbe peinture ... bleue !

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- La Poupe : chalutier, construit à Arcachon en 1953 : La Poupe (AC 12736). 

- La Mado : construit aux Chantiers Jean Lefèvre à Etaples, portant le matricule AC 14198, La Mado. Coulé volontairement, sauf qu'au moment crucial, il refusa de couler. C'est donc à coups de hache dans la cale, que l'entreprise Gentil réussit à le faire sombrer.

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- Le Santez Anna : construit au Croisic en 1947, fut lui coulé en 1977. 

 - la Petite Fleur de Lisieux : en 1987, dans un creux du trou Saint Yves, à 32 mètres de fond, la Petite Fleur de Lisieux est venue elle aussi servir de frayère à poissons. C'est par un petit coefficient de marée, que le Libertad, vedette de promenade, remorqua ce chalutier jusqu'à sa destination finale.

Sources : journal SUDOUEST - Auteur : is. de Montvert-Chaussy - Illustration Delphine Soucail - http://cpa33.plongee.free.fr


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